Edouard Durand, le juge paterphobe
4 décembre 2014
Edouard Durand, le juge paterphobe
Ex-juge aux affaires familiales, ex-juge des enfants, coordinateur de formation à l’Ecole Nationale de la Magistrature. Depuis 2015, conseiller à la Cour d’appel d’Orléans.
Auteur d’un seul (et mince) livre :
Violences conjugales et parentalité. Protéger la mère, c’est protéger l’enfant. L’Harmattan, 2013
Un livre très idéologique, qui reprend, sans rien inventer, les éléments connus sur la violence conjugale, mais en les insérant dans un cadre misandre strict (et de même lorsqu’il évoque le SAP, les fausses accusations, l’hébergement des enfants du divorce, etc.). Nous n’évoquons son auteur qu’à cause de sa position institutionnelle, une position qui confère une crédibilité à son discours sexiste. Et en même temps qui en dit long sur le le degré d’imprégnation idéologique de l’institution judiciaire.
Tout est dit dans le sous-titre : "Protéger la mère (...)". Pourquoi "la mère" plus particulièrment ? On pressent un certain parti-pris (sentiment qui s’amplifie lorsqu’on apprend que l’un des relecteurs n’est autre qu’un certain Maurice Berger !).
Il le confirme dans un passage absolument ahurissant, situé dans la partie Violences conjugales et domination masculine (p. 17) :
Tout d’abord, si les violences peuvent survenir dans toutes les configurations conjugales (dans les couples hétérosexuels par l’homme sur la femme comme par la femme sur l’homme, et dans les couples homosexuels), elles sont très massivement, au long de l’histoire et dans toutes les cultures, le fait de l’homme sur la femme. Cette réalité nous conduira d’ailleurs dans cet ouvrage à désigner la victime des violences comme la femme, la mère ou la victime d’une part, et à désigner l’auteur comme le mari, le père ou l’auteur.
Ce passage consiste à la fois en :
- une contradiction absolue : si "les violences peuvent survenir dans toutes les configurations possibles", alors il faut parler exclusivement d’"auteur" (ou d’"auteur(e)" pour mieux coller à la réalité) et de "victime". Parler systématiquement de "père" et de "mari", c’est nier la réalité. Et, dans le cas de Durand, c’est nier la réalité telle qu’il la décrit lui-même !
- une affirmation non-sourcée : aucune étude statistique à l’appui, comme dans l’ensemble du livre d’ailleurs.
- une affirmation mensongère : nous savons depuis longtemps (voir notre rubrique Violences conjugales) que ces violences, dans notre époque et "dans toutes les cultures", ne sont pas "massivement (...) le fait de l’homme sur la femme", mais au contraire, de manière égale, le fait de l’un et l’autre sexe. Concernant "l’histoire", les données sont rares et cela devrait inciter Durand à la prudence, mais il n’y a aucune raison de penser que les choses se soient passées différemment.
Nous reconnaissons à Durand un seul mérite, celui d’une certaine franchise. Habituellement, les idéologues misandres mentent implicitement, en ne parlant des violences qu’au masculin. Lui, il annonce qu’il ne parlera des violences qu’au masculin, après avoir affirmé qu’elle relèvent aussi du féminin ! Un parti-pris assumé...
Dans la pratique, cela donne par exemple :
- p. 35 : Afin de renforcer la sécurité de la mère et des enfants (...)
- p. 65 : Dans l’huis clos familial, comment l’enfant peut-il penser que son père n’a pas le droit de frapper sa mère ?
- p. 93 : il paraît essentiel que le père reconnaisse sa violence et en assume la responsabilité
Ce discours est malheureusement des plus courants aujourd’hui. Mais le fait que Durand le tienne en étant juge, et formateur de juges, est spécifique, et pose des questions spécifiques :
- au long de sa carrière, et encore aujourd’hui, ce "juge" rend-il ses décisions ou ses conseils en fonction de son idéologie, c’est-à-dire en fonction du sexe des plaignants et des mis en cause ?
- plus précisément, a-t-il pour règle, indépendamment des éléments objectifs, de prendre la priori le parti des femmes (plaignantes ou mises en cause) parce qu’elles sont femmes, ou de prendre parti a priori contre les hommes (plaignants ou mis en cause) parce qu’ils sont hommes ?
- si c’est le cas (et s’il n’est, comme c’est vraisemblable, pas le seul dans ce cas) peut-on encore s’étonner que les hommes victimes renoncent à saisir la "Justice", se disant que cela ne servira à rien car de toute façon ils seront déboutés en raison de leur appartenance au sexe masculin ?
- dans son "enseignement" à l’ENM, s’efforçait-t-il de faire partager aux futurs magistrats son idéologie, avec toutes les conséquences que cela implique ?
- comment a-t-il pu faire une telle carrière ? Comment la hiérarchie judiciaire a-t-elle pu laisser gravir les échelons à quelqu’un qui manifeste un tel manque d’objectivité, une telle partialité et une telle affirmation publique de celles-ci, dans des professions qui sont justement fondées sur l’objectivité et l’impartialité ?
Citons un dernier passage, qui surprend et interpelle (p ; 72) :
Cependant, le fait que moi, Edouard Durand, je sois une personne démunie face à la violence en raison des traits de ma personnalité, de mon histoire, de mon contexte de vie, que je sois faible au point que la violence me tétanise et que je n’aie pas les ressources de m’y opposer ne signifie en aucune façon que je la recherche, ni même que j’y consente et que l’on puisse m’en dire (co)responsable d’une manière ou d’une autre.
Que voilà un autoportrait attendrissant ! Durand se présente comme un doux, un agneau, terrifié par la violence tant elle lui est, suggère-t-il, complètement étrangère. L’ayant lu, nous nous inscrivons en faux contre cette prétention. Durand, au contraire, et qu’il en soit conscient ou non, est un sexiste, un hyper-violent. Son livre est une extrême violence contre les hommes en général, auxquels il fait porter la responsabilité exclusive de la violence conjugale, et en particulier contre les hommes victimes, dont il nie l’existence et la souffrance, et qu’il fait désespérer de trouver un quelconque secours de la part de la Justice.
(décembre 2014)
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(Mise à jour avril 2022)
Durand continue ses exploits. Son premier livre a été réédité (peut-être enrichi ?) chez Dunod en février 22.
Il est préfacé par une certaine Ernestine Ronai.
Celle-ci semble une collaboratrice importante pour lui puisqu’il a antérieurement signé trois livres avec elle, chez Dunod :
- 2017 : Violences conjugales : le droit d’être protégée (on appréciera la féminisation de "protégée" qui suggère que seules les femmes en ont besoin - en couverture : deux femmes et une petite fille.)
- 2020 : Violences conjugales : un défi pour la parentalité (en couverture, une femme et une petite fille). Deux titres de sous-parties : "L’émergence publique de la problématique des violences faites aux femmes", "Mieux protéger les femmes victimes de violence, c’est leur permettre de mieux protéger leurs enfants"
- 2021 :Violences sexuelles, en finir avec l’impunité (en couverture, une femme). Un titre de sous-partie : "les mutilations sexuelles féminines" (les garçons ne sont pas mutilés ?)
On voit que chacun de ces ouvrages est fortement connoté misandre. On le comprend d’autant mieux en considérant la biographie d’Ernestine Ronai.Née en 1947, celle-ci, précoce, a adhéré au parti communiste à l’âge de 13 ans (sic). En 2002, le conseil départemental de la Seine-Saint-Denis lui confie la création du premier Observatoire départemental des violences faites aux femmes. Elle coordonne, avec Edouard Durand, le diplôme universitaire "Violences faites aux femmes" à l’Université Paris 8 (premier diplôme de ce genre en France). De 2013 à 2017, elle coordonne la lutte contre les violences faites aux femmes au sein de la MIPROF.
Bref, ces deux-la sont manifestement sur la même longueur d’onde (sexiste).
En 2021, Durand est nommé à la présidence de la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles (Ciivise). Est-il bien prudent de nommer à ce poste quelqu’un qui a des préjugés aussi négatifs sur un sexe, et aussi positifs sur l’autre ?
En 2022 Durand publie (tout seul comme un grand) "Défendre les enfants" chez Seuil. On devine qu’il sous-entend "contre les méchants pères".
(à suivre)
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Durand n’est pas un cas isolé. Il présente l’avantage d’être facilement identifiable parce qu’il écrit et fait connaître son sexisme de manière explicite, ce qu’évitent la plupart des juges. Cependant, il a eu un prédecesseur, sur lequel nous ne nous attarderons pas car il a cessé son activité. Il s’agit de Luc Fremiot.
Dès 2003, Procureur de la République à Douai, il avait mis en place un dispositif de lutte contre les violences conjugales... faites aux femmes exclusivement. Voici ce qu’il en disait à Elle le 22 avril 2013 (elle.fr/Societe/Les-enquetes/Luc-Fremiot-Ne-fermez-plus-les-yeux-devant-les-femmes-battues-2428027) :
La première consigne que j’ai donnée, c’est d’annuler les mains courantes, qui ne servent à rien, et d’intervenir immédiatement. Ensuite, parce que je considère inacceptable qu’une femme victime de violences soit obligée de quitter son domicile, nous avons cherché des structures d’accueil pour éloigner les hommes. (...)
A la sortie du foyer, puis après être passés devant le tribunal correctionnel, les hommes avaient l’obligation de participer à des groupes de responsabilisation.
Très clair, n’est-ce-pas ? Le discours de Fremiot avait été accueilli à bras ouvert par de nombreux médias. En 2014, il a publié un récit autobiographique, Je vous laisse juges (Michel Lafon), dont la 4e partie s’intitule La lutte contre les violences conjugales (p. 133-186). A aucun endroit, bien sûr, il n’y est question des hommes victimes...
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