Cali : « On revendique l’égalité absolue ». L’Express, 25 mai 2006


 

Cali : « On revendique l’égalité absolue »
 
propos recueillis par Marie Huret
 
Pour L’Express, le chanteur catalan Cali revient sur son propre combat
 
Dans votre album Menteur, vous disséquez la paternité blessée. Et vous avez fondé une association pour défendre les pères divorcés. Pourquoi ?
 
Il y a six ans, je me suis séparé de la mère de Milo, mon fils, à l’époque âgé de 2 ans. En sept minutes, un juge a décidé que je n’aurais pas la garde de mon môme. J’ai dû prouver que j’étais un bon père et je me suis fait traiter de troubadour par l’avocat adverse. Le verdict : un week-end sur cinq. Je devenais un papa du dimanche. Or pour moi, un père, ça lange, ça balade, ça emmène son enfant à l’école. Je fais partie de cette génération qui a assisté à la première échographie, aux cours de respiration. Cela fait longtemps que les pères ne vont plus aux champs à 5 heures du matin ! J’ai lu les tracts des Chiennes de garde : il ne faudrait pas séparer l’enfant de sa mère. Mais, merde, ce n’est pas cela qu’on demande ! On revendique l’égalité absolue : un père, autant qu’une mère, peut s’occuper de ses enfants.
 
Après quatre ans de lutte, vous avez obtenu la résidence alternée. Vous réclamez son application systématique...
 
Pourquoi ne serait-elle pas décrétée d’office par le juge ? Ensuite, seulement s’il y a un problème, on en discute. Je ne dis pas que c’est la solution idéale, mais elle me semble plus juste. Quand tu n’as ton fils que quarante-huit heures par mois, tu n’essaies de vivre que du bonheur concentré. Et là, c’est une faute, j’ai péché là-dessus : un enfant, il faut le gronder, surveiller les devoirs. L’équilibre père-mère doit être total pour qu’à 14-15 ans ce petit con normal respecte notre autorité. Si jamais on nous ampute de son enfance, nous les pères, le môme aura le droit de nous dire, quand il aura 15 ans : Tu es qui ? Et tu étais où ?
 
En réalité, très peu de pères demandent la garde alternée. D’autres fichent le camp...
 
Ils sont minoritaires ! Et on les amène sur la voie de la démission. A l’école, il y a eu une année où la maîtresse de mon fils, très amie avec mon ex, ne me mettait au courant de rien, refusait de me donner les dessins. J’ai écrit à l’inspecteur d’académie, elle est montée sur ses grands chevaux, mais tout s’est calmé. J’ai reçu ce qu’il fallait quand il fallait. Heureusement mes sœurs, mes amis m’ont dit : Ne lâche rien. Seul, on n’a pas les moyens de se battre. Noyés de chagrin, certains essaient d’oublier leur vie de papa, de faire comme si rien n’avait existé. C’est un deuil. Je dis clairement à ceux qui sont au fond du trou : Battez-vous ! Et vous verrez votre enfant comme il faut. Je l’ai vécu.
 
C’est votre père qui vous a élevé, cela explique-t-il votre engagement ?
 
J’étais très jeune quand j’ai perdu ma mère. J’ai été élevé par mon père et mes grandes sœurs. A l’époque, pour un veuf, la logique, c’était de se remarier ou de confier les gamins à la grand-mère. Papa, lui, est resté. La famille, c’est mon équilibre absolu. Si je la perds, je chavire.
 
L’Express du 25/05/2006


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