Quand les femmes aimeront les hommes (extrait). Odile Lamourère, 2005


Quand les femmes aimeront les hommes. Odile Lamourère. Editions de l’homme, 2005
 
[L’auteure a été conseillère conjugale, puis organisatrice durant huit ans du Salon des célibataires, à Paris. A travers ces expériences elle a progressivement créé une profession spécifique, qu’elle définit comme « conseillère pour célibataires et divorcés », et rencontre depuis vingt ans des femmes et des hommes qui vivent seuls, des « solistes ». Cette expérience l’a amenée, entre autres, à des constats qui vont à contre-courant du discours dominant. Ci-après quelque extraits toniques où sont mises en évidence les contradictions de l’idéologie misandre, et jetées les bases d’une communication pacifique entre les sexes.]
 
p.15
 
Ah ! Les femmes !
 
Je suis souvent satisfaite d’être une femme, mais à d’autres moments pas très fière de mes réactions face aux hommes ni de voir mes consœurs avancer vers eux les armes à la main. C’est pourquoi je me permettrai d’insister plus loin sur nos forces acquises ou innées, mais surtout de souligner en quoi et comment notre pouvoir et la responsabilité qu’il implique devraient tendre vers la paix.
 
Il m’a fallu du temps pour me remettre en cause et, grâce aux hommes blessés que j’ai entendus, j’ai pu saisir la juste place de chaque souffrance. D’une part, l’évolution des femmes était indispensable mais, d’autre part, la guerre des sexes nous a tous blessés.
 
J’aimerais trouver avec mes sœurs la route vers la paix, à forces égales et avec amour. C’est en tant que femme que j’aimerais, avec celles qui aiment les hommes ou voudraient les aimer, ouvrir les portes de la tendresse tout en conservant nos acquis.
 
Même si j’ai aimé le XXe siècle, j’espère que le suivant sera plus doux entre nous. Il y a eu des guerres en tout genre, des rapports de forces ultimes, des victoires et des débâcles… J’ai surfé sur le féminisme et ses apports, les grandes comme Weil, Giroud et Halimi m’ont aidée à m’affirmer et à devenir entière, mais je sais aussi à quel point notre « marathon », lors de la révolution-évolution, a perturbé nos hommes et nos relations amoureuses. Il est temps de lâcher nos armes et de quitter nos armures…
 
p.102 
 
Où est passée la galanterie ?
 
La galanterie : encore un autre terme que je croyais périmé depuis la prétendue évolution des femmes. Eh bien, non ! Voilà qu’il revient parmi nous.
 
Oui à l’égalité, mais attention, chacun son truc : la galanterie, c’est pour les hommes !
 
Quelle misère que de devoir traiter de sujets qui n’avaient plus cours dans les années soixante. Comme si des questions restées depuis lors au fond de la gorge des femmes remontaient à présent. Je ne saurais l’expliquer autrement que par une régression venue peut-être d’ailleurs et que j’aimerais contribuer à enrayer.
 
Il paraît que la galanterie se perd alors que moi, je la croyais même enterrée. Ils ne seraient plus « galants ». Et moi qui croyait bêtement que nous avions remplacé ce terme, exclusivement masculin, par le respect mutuel et réciproque auquel chacun, chacune a droit !
 
Mais certaines lisent trop Proust ou d’Ormesson, se régalent de films de l’époque des dandys (qui étaient par ailleurs de sacrés gaillards parfaitement machos), regrettant ceux qui faisaient le tour de la voiture pour tenir la porte ouverte, se courbaient pour baiser une main, tiraient la chaise pour que madame s’assoie et faisaient porter des roses le même jour à toutes leurs maîtresses.
 
Comme si nous, les femmes, faisions preuve de tant de finesse, de délicatesse et de charme immuable pour prétendre, au delà de l’égalité acquise, à bien davantage. Il me semble entendre qu’un homme un peu larbin ne déplairait pas. Larbin, mais ayant le geste large pour l’addition du restaurant… Pensant à Coluche qui disait qu’il y en a « de plus égaux que d’autres », il me semble que certaines voudraient être encore plus qu’égales…
 
On demande la Lune aux hommes, et ils ne l’ont pas. Certains se résignent, d’autres renoncent, quelques-uns s’orientent vers les femmes (que j’espère nombreuses) qui savent lier romantisme et réalisme tout en assumant leur siècle.
 
Que l’on se rassure. Des hommes qui pensent aux fleurs, il y en a, même si personnellement je préfère un cadeau rigolo, une bouteille, un livre, un disque que j’aime. Ces petites attentions me touchent beaucoup plus.
 
p.209
 
Il faut maintenant apprendre à apprécier la sensibilité des nouveaux hommes qui enfin s’ouvrent à nous en sachant combien leur fragilité est due à des déboires imprévus… avec les femmes.
 
Bien que nous ayons négligé, mal vécu ou mis au second plan par nécessité le bien-vivre ensemble, j’espère que mes sœurs savent que sans hommes la vie serait bien morne. Et si, au-delà de l’égalité conquise, nous clamons nos victoires et déployons sans cesse devant eux l’étendard aux couleurs de notre guerre, nous pouvons craindre qu’il faille bientôt trouver des moyens d’en sauvegarder l’espèce ! Voulons-nous vivre dans un monde de femmes et d’homosexuels ? C’est fort sympathique à la verticale, mais nos nuits risquent d’être bien plates.
 
Je rassure les romantiques inquiètes, il y a encore des hommes kamikazes et des femmes souriantes faisant des amoureux de tout âge qui déambulent main dans la main pour notre régal visuel. Il y a aussi des femmes sans handicaps dont les hommes s’approchent, car auprès d’elles ils ne ressentent ni angoisse, ni rejet, ni jugement hâtif.
 
Si nous osons un mot gentil pour mettre en confiance et permettre de séduire, il en restera toujours quelque chose de bon pour nous. Retrouvons le soir nos dentelles que le boulot du jour nous oblige à remplacer par le tailleur strict, le col montant et les chaussures plates. Sachons que la douceur et la tendresse ne sont pas des signes fatals de soumission. Laissons aux hommes la porte ouverte ou entrouverte, en restant vigilantes. Soyons toutes et tous prudents, mais surtout pas méfiants.
 
p. 239
 
Pour mémoire : règles de vie, règles d’amour
 
L’amour inclut la valorisation des adultes et des enfants qu’on aime. Sans elle, il n’y a que des complexés et des titubants devant la vie. Un homme dévalorisé ne peut séduire, un mari découragé partira pour celle qui saura le mettre en valeur, sans complaisance, mais simplement parce qu’elle saura regarder le côté soleil d’un homme dont l’ex ne voulait voir que les côtés noirs.
 
Ne réduisons pas un homme tout neuf au macho précédent, aux machos séculaires, au papa à qui maman disait toujours « oui ». Ne cherchons pas d’abord ce qu’il nous apporte, mais plutôt ce que nous sommes capables de lui offrir. Rangeons enfin nos panneaux de revendications, il y a d’autres moyens pour plaider notre cause.
 
Quand nous parlons d’eux, restons modestes, car s’il y a une égalité certaine, c’est celle des incompétences, des souffrances et des déconvenues côté masculin et féminin.
 
p. 241
 
Mes erreurs
 
Je ne me propose pas ici de faire un mea culpa, mais plutôt une mise au point, ce qui peut m’autoriser à traiter le sujet de mes erreurs. J’en ai fait beaucoup.
 
J’ai parlé des « mecs » en leur reprochant de parler des « nanas ». J’ai eu des phrases très dures, du genre : « C’est à prendre ou à laisser. » Je me souviens, et n’en suis pas très fière, du jour où un ami au volant près de moi faillit écraser un passant et où je me suis écriée : « Attention, il peut encore servir ! »… J’ai parlé aux copines en riant de ce c… qui s’y était si mal pris au lit et d’un autre, romantique aux abois, qui pouvait toujours attendre tellement son comportement de paillasson m’était insupportable.
 
Je les voulais tendres et passionnés à la fois, qu’ils aient une forte personnalité mais qu’ils soient à ma disposition ; je recherchais les sensibles, mais j’étais vite saturé de leurs confidences émouvantes ; je voulais être le centre de leur monde, mais je ne voulais surtout pas être tenue de répondre à leurs appels téléphoniques en dehors de mes heures « ouvrables », c’est-à-dire quand j’en avais envie. Il m’est même venu à l’idée d’en trouver un à mettre dans l’entrée, au portemanteau, pour le sortir quand j’en avais besoin. Oui, j’ai dit et fait tout cela, et pire encore, sans compter ce qui a dû blesser et dont je n’ai pas toujours été consciente.
 
Alors, maintenant, je remets peu à peu les pendules à l’heure. Le temps de la revanche est dépassé ; sans doute cette période m’a-t-elle été nécessaire, même si elle a prolongé le temps des erreurs et des coups bas.
 
Le chemin est long mais, pour moi, faire de ses relations un paysage harmonieux, c’est réussir sa vie.
 


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